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empire du bien - Page 2

  • Logique hygiéniste et État maternel...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire, dans lequel il évoque l'empire du Bien et son idéologie...

     

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    Gare à la logique hygiéniste imposée par l’État maternel thérapeutique !

    Vous venez de publier aux Éditions Pierre-Guillaume de Roux « Les démons du bien » , essai dont la première partie se veut une critique radicale de la tyrannie des bons sentiments. A quoi attribuez-vous l’émergence de ce néo-cléricalisme ?

    À l’esprit du temps. Mais l’esprit du temps n’est jamais que la résultante d’une tendance de fond. À partir du XVIIIe siècle, la montée sociale de la classe bourgeoise a simultanément marginalisé les valeurs aristocratiques et les valeurs populaires, en les remplaçant par ce que Tocqueville appelait les passions « débilitantes » : utilitarisme, narcissisme et triomphe de l’esprit de calcul. La vogue de l’idéologie des droits de l’homme a, de son côté, permis à l’égoïsme de se draper dans un discours « humanitaire » dont la niaiserie est le trait dominant. L’accélération sociale et la montée de l’insignifiance ont fait le reste.

    L’un des traits caractéristiques de « l’empire du bien » est cet envahissement du champ politique par le lacrymal et le compassionnel qui fait qu’à la moindre catastrophe ayant une portée médiatique, les ministres se précipitent désormais pour exprimer leur « émotion ». C’est également révélateur de la submersion de la sphère publique par le privé. La vie politique bascule du côté d’une « société civile » appelée à participer à la « gouvernance » par des « demandes citoyennes » qui n’ont plus le moindre rapport avec l’exercice politique de la citoyenneté. Il est désormais beaucoup mieux vu (et aussi plus rentable) d’être une victime qu’un héros.

    Parallèlement, la marchandisation de la santé va de pair avec la médicalisation de l’existence, c’est-à-dire avec un hygiénisme dogmatique qui se traduit par une surveillance toujours plus grande des modes de vie. Elle prescrit socialement des conduites normalisées, cherchant ainsi à domestiquer toutes les façons d’être qui se dérobent aux impératifs de surveillance, de transparence et de rationalité. On assiste à l’instrumentalisation de la vie humaine au travers d’une logique hygiéniste imposée par l’État maternel thérapeutique.

    L’évolution du langage est également significative. On préfère parler désormais de « fractures sociales » – aussi accidentelles en somme que les fractures du tibia – que de véritables conflits sociaux. Il n’y a plus d’exploités, dont l’aliénation renvoie directement au système capitaliste, mais des « déshérités », des « exclus », des « défavorisés », des « plus démunis », tous également victimes de « handicaps » ou de « discriminations ». La notion de « lutte contre-toutes-les-discriminations » a d’ailleurs elle-même remplacé celle de « lutte contre les inégalités », qui évoquait encore la lutte des classes. Dans 1984, George Orwell expliquait très bien que le but de la « novlangue » est « de restreindre les limites de la pensée » : « À la fin, nous rendrons impossible le crime par la pensée, car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer. » Le politiquement correct fonctionne comme la « novlangue » orwellienne. L’usage de mots détournés de leur sens, de termes dévoyés, de néologismes biaisés ressortit de la plus classique des techniques d’ahurissement. Pour désarmer la pensée critique, il faut sidérer les consciences et ahurir les esprits.

    Les médias ne cessent de dénoncer la menace de l’« ordre moral », tout en nous faisant en permanence la morale. Paradoxe ?

    C’est tout simplement qu’une morale en a remplacé une autre. L’ancienne morale prescrivait des règles individuelles de comportement : la société était censée se porter mieux si les individus qui la composaient agissaient bien. La nouvelle morale veut moraliser la société elle-même. L’ancienne morale disait aux gens ce qu’ils devaient faire, la nouvelle morale décrit ce que la société doit devenir. Ce ne sont plus les individus qui doivent se conduire de façon droite, mais la société qui doit être rendue plus « juste ». L’ancienne morale était ordonnée au bien, tandis que la nouvelle est ordonnée au juste. Alors même qu’elles prétendent rester « neutres » quant au choix des valeurs, c’est à cette nouvelle morale, fondée sur le devoir-être (le monde doit devenir autre chose que ce qu’il a été jusqu’ici), qu’adhèrent les sociétés modernes. Nietzsche aurait parlé de « moraline ».

    L’essentiel de votre livre porte sur la théorie du genre, dont tout le monde parle en ce moment. Vous avez été l’un des premiers intellectuels à en faire une critique argumentée. Une fois de plus, à quoi attribuer ce phénomène venu des USA ? Et d’abord, de quoi s’agit-il exactement ?

    La théorie du genre est une théorie qui prétend déconnecter radicalement l’identité sexuelle du sexe biologique. Le sexe, remplacé par le « genre » (gender), serait une pure construction sociale. Cette théorie repose sur un postulat de « neutralité » de l’appartenance sexuelle à la naissance : il suffirait d’élever un garçon comme une fille pour en faire une femme, ou d’élever une fille comme un garçon pour en faire un homme. Ceux qui sont d’un avis différent sont accusés de propager des « stéréotypes » (on oublie qu’un stéréotype n’est jamais qu’une vérité empirique abusivement généralisée). Cette théorie a pour effet de confondre les deux sexes et de rendre plus difficile à chacun d’eux d’assumer son identité.

    La théorie du genre est en fait insoutenable. Non seulement son postulat d’une « neutralité sexuelle » originelle ne correspond pas à la réalité, mais on constate que l’appartenance sexuée favorise dès la plus petite enfance, avant tout conditionnement, des comportements spécifiques à chaque sexe. Cela ne signifie pas que les constructions sociales ne jouent aucun rôle dans la définition de l’identité sexuelle, mais que ces constructions sociales se développent toujours à partir d’une base anatomique et physiologique. La théorie du genre confond par ailleurs le sexe biologique, le genre (masculin ou féminin), l’orientation sexuelle et ce qu’on pourrait appeler le sexe psychologique (le fait qu’un certain nombre de femmes ont des traits de caractère masculins, et un certain nombre d’hommes des traits de caractère féminins). Reposant sur l’idée qu’on peut se créer soi-même à partir de rien, elle relève en fin de compte d’un simple fantasme d’auto-engendrement. Il faut pourtant la prendre très au sérieux. Dans les années qui viennent, c’est en référence à elle que l’on va voir se multiplier à l’infini les accusations de « sexisme ».

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 13 janvier 2014)

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  • Cycle mortel !...

    « Le petit monde parisien s'agitait de plus en plus. L'une des victimes était juive : défilé Bastille-Nation contre l'antisémitisme. Une autre noire : re-défilé contre le racisme et l'esclavage. Une autre enfin était homosexuelle : re-re-défilé contre l'homophobie. Dommage qu'on ait pas trouvé de Falacha inverti parmi les victimes, ça aurait permis de n'organiser qu'une seule manifestation.»

     

    Les éditions Ecriture viennent de publier Cycle mortel un court roman de François Marchand, particulièrement réjouissant et grinçant, dans la veine de Philippe Muray. Ancien fonctionnaire au Ministère du travail, François Marchand est l'auteur de plusieurs romans drôles et féroces comme L'imposteur (Le cherche midi, 2009) ou Plan social (Le cherche midi, 2010).

     

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    " Paris, 2015. Les usagers du Vélib' sont terrassés les uns après les autres. Ils tombent brutalement de leur engin, sans que la médecine légale puisse expliquer la cause de ces morts soudaines...
    Il n'en faut pas plus à Béchetoile, maire de la capitale, pour voir là un complot destiné à éliminer les électeurs de gauche et à lancer une grande campagne médiatique favorable à l'extrême droite.
    Cette piste, toutefois, ne convainc pas le commissaire Moullimard, policier dilettante, qui préfère humer l'air parisien ou miser sur le hasard des rencontres pour tenter de comprendre le processus d'éradication des cyclistes.
    Pendant ce temps, pour la « Nuit blanche », Béchetoile mobilise ses troupes qui vont semer sur leur passage pillage et désolation. Ces meutes d'humanistes s'apprêtent à dévaster la ville, dont Moullimard pressent qu'il ne restera rien... "

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  • Hygiène et vertu...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue sympathique de Jean-Paul Brighelli, cueilli sur son blog Bonnet d'âne et consacré à l'hygiénisme vertuiste qui sévit dans l'Empire du bien... Agrégé de lettres modernes, Jean-Paul Brighelli est l'auteur de plusieurs essais sur l'école. Il a récemment publié La société pornographique (François Bourin, 2012).

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    Hygiène et vertu

    Ainsi donc, les coureurs cyclistes des années 1990 se dopaient — tu parles d’une nouvelle ! On a soigneusement conservé leurs mictions pour les analyser vingt ans plus tard, et Jalabert est pris par la patrouille des touche-pipi.
    Le mois dernier, les analyses d’Armstrong et autres gros bras révélaient que les grands champions ne fonctionnaient pas à l’eau claire — on a sanctionné l’Américain (bien fait pour lui, il est… américain), mais on n’a pas osé pousser la logique jusqu’au bout et destituer les cinquante coureurs arrivés à ses basques (parce que franchement, rayer Armstrong des registres et garder Ullrich…), qui ne fonctionnaient pas non plus à l’eau minérale. Demi-mesure : on aurait dû les décapiter sur les Champs-Elysées, où ils sprintaient en se moquant du pauv’ peuple et des journalistes qui, bien sûr, n’étaient absolument pas au courant de la fable du peloton.
    Pendant que l’on stigmatise le cyclisme, on évite de se poser la moindre question sur le type de carburant que les joueurs de foot s’injectent dans les veines. C’est qu’il y a beaucoup d’argent dans le foot (un cycliste professionnel « ordinaire » gagne à peine plus qu’un prof débutant — autant dire que dalle), et que la vertu sportive exigée est inversement proportionnelle aux sommes en jeu. En vingt ans, on a épinglé un ou deux joueurs de tennis. Aucun golfeur (si, si, on se dope aux béta-bloquants dans les sports de précision), aucun joueur de base-ball, aucun boxeur, aucun…
    Soyons clairs : on savait dès les années 1900 que le Tour demande des efforts inhumains (« Vous êtes des assassins ! », hurlaient les frères Pélissier, qui se chargeaient à l’époque en cocaïne, au témoignage d’Albert Londres, aux organisateurs en 1924 — voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Pélissier). Que personne ne roule à cette allure sur 3500 kilomètres sans composer avec la nature. Qu’aucun sportif, jamais, n’est parvenu au sommet sans passer des arrangements avec les règlements — pas plus les athlètes grecs d’Olympie que les champions d’aujourd’hui.
    Et les guerriers (le sport n’est jamais que de la guerre édulcorée, n’est-ce pas…) n’ont jamais non plus craché sur un petit cordial avant de monter à l’assaut — Douaumont, c’était autre chose que le Galibier ou le Ventoux (eh, lecteur de passage, tu as déjà essayé d’escalader le Ventoux via Bédoin ou Malaucène à la seule force de tes petits mollets de coq en moins de deux heures ? Charly Gaul le faisait en 1958 en une heure et des broutilles, mais en combien de temps l’ont gravi Armstrong et Pantani en 2000…).
    Sans parler des tonnes de Viagra absorbées avant de grimper Madame — ah, mais ça, paraît-il, ce n’est pas de la triche, c’est l’art d’aider la Nature, n’est-ce pas… Pourtant, on devrait l’interdire, si l’on tient compte que l’on meurt aussi bien sur les côtes de la créature qu’en grimpant le Ventoux en 1967.
    Nous sommes entrés dans une ère vertueuse qui me fait gerber. Je ne fume pas, la fumée des autres me gêne parfois, j’ai horreur d’embrasser les cendriers froids, mais j’ai la politesse de ne pas le leur dire. Les envoyer grelotter sur les trottoirs en plein hiver est une vexation immonde. L’ostracisme général lancé en direction des nicotineurs n’est jamais qu’une façon de se dédouaner des bénéfices considérables encaissés par l’Etat — en taxes acquittées et pensions non versées à des fumeurs heureusement décédés, en moyenne, à l’heure du départ à la retraite (si, si, c’est le calcul qui a été fait pour légitimer la perpétuation de la vente : le tabac, qui pour l’essentiel tue après cinquante ans, quand on a déjà l’essentiel de sa carrière derrière soi, rapporte plus qu’il ne coûte en soins médicaux). Assez curieusement, ce sont les substituts de tabac que l’on veut faire interdire aujourd’hui, au nom d’un principe de précaution que l’on n’a jamais imposé ni à Marlboro ni à Gitanes — cherchez l’erreur. Une façon aussi pour les non-fumeurs d’exhiber leur vertu. Ah, comme ils doivent se sentir meilleurs… La santé est l’antichambre de la sainteté.
    Le chantage à la santé explose. Mangez bio (en fait, il y a un gigantesque marché du bio sur lequel se sont lancés les Allemands bien avant nous), roulez à pied (si je puis m’exprimer ainsi), achetez des produits issus du commerce équitable (si vous vous imaginez que les paysans du Chiapas voient la couleur de votre argent, c’est que vous êtes vraiment des bobos gogos), calculez le bilan carbone de chaque produit acheté, et votez EELV — là, c’est le sommet — en jouant avec le PS un tango bien à vous (un pied dedans, un pied dehors). Réduisez le déficit de la Sécu. La vertu écolo parle par impératifs puissamment catégoriques.
    Non que j’aie adopté le slogan de Churchill (« No sport ! ») ni que je consente de bon gré à bouffer de la merde. Mais la vertu décrétée, l’hygiène obligatoire, m’amènent à penser que nous sommes entrés dans un fascisme de la santé par conformité qui me donne une légère nausée. Ces oukases perpétuels sont le plus mauvais héritage de la vertu robespierriste — avec à la clé le même goût pour la terreur. M’étonne guère que Meirieu soit écolo, tiens !
    La vertu n’est pas, contrairement à ce que pensait Montesquieu, la clé du gouvernement républicain — qui n’a jamais été aussi grand qu’avec à sa tête des hommes qui s’embarrassaient peu de morale, voyez Clémenceau ou Roosevelt, ou même Mitterrand, qui ne fut jamais un exemple de vertu, ni privée, ni publique. La vertu est l’outrance de la République. Ce puritanisme est le symptôme des temps de crise. On hait sa famille, comme disait Gide, lorsqu’on entend l’appel du large — mais le large, aujourd’hui, est houleux. Alors, repliement sur la cellule primitive, la grotte, le terrier. L’écolo rêve d’être un lapin. Tous aux abris. Division binaire entre le sain et le malsain, le vertueux et le vicieux, le bien et le mal, le carnivore et le végétarien, le libertin et le curé. Rousseau c’est bien, et Céline est le mal. Capote obligatoire entre pucelles et puceaux, et macrobiotique imposée. Haro sur le steack, à moins qu’il ne soit de soja. L’antispécisme fait des ravages, le végétarisme aussi. On nous menace de cancers divers (pour un peu, les croisés de la santé à tout prix nous les souhaiteraient, pour nous faire les pieds — creuse ta tombe avec tes dents en te délectant d’une entrecôte aimablement persillée, hé, assassin…). On cherche à nous culpabiliser sur le sucre, sur le sel, le fumé, le grillé, — ou la quantité. Riz complet pour tout le monde ! Arrosé au Robinetus Simplex, parce que les alcools élevés en barriques de bois contiennent eux aussi des poisons innommables, et que le bilan carbone des eaux minérales en bouteilles plastiques est lamentable. Et si j’ai envie de regarder les bulles dans mon verre ? Mais non, Perrier ou Dom Pérignon, c’est fou.
    J’ai très envie d’écrire un petit livre qui réhabiliterait la viande, la bidoche, la barbaque, histoire de répondre au No steack d’Aymeric Caron. Un livre qui dirait le plaisir d’écraser entre ses dents les cellules ingénieusement attendries en mûrissoirs, saisies sur des braises adéquates, recouvertes d’une croûte caramélisée voluptueuse (merci à Maillard qui le premier a décrit cette réaction !), gorgées de sang et d’Histoire — car déguster un steack (voir Barthes sur le sujet) renvoie à une chronologie et à une culture bien plus que millénaires. La viande était l’aliment de base des gladiateurs romains, le mets de choix des Grecs qui ne sacrifiaient aux Dieux que l’odeur des festins, tout comme le gigot de pré-salé était le carburant majeur (avec les saumons qui remontaient alors le Couesnon) des ouvriers qui rebâtissaient le Mont Saint-Michel avec Corroyer en 1878.
    Mais le steack, c’est le plaisir, et le plaisir sera macrobiotique ou ne sera pas. D’ailleurs, il vaut mieux qu’il ne soit pas — le plaisir est suspect.
    Une jeunesse nourrie (intentionnellement ?) aux McDo et autres substances molles est la cible de choix de cette culpabilisation systématique. Le mou marque la récession vers l’infantile. Mâcher sera bientôt une activité anachronique : après les dents de sagesse, ce sont désormais les canines qui disparaissent — ou que l’on fait sauter pour que les incisives aient un peu de place dans les mâchoires étroitisées du troisième millénaire.
    Amis de Cro-Magnon et de Néandertal, ressaisissez-vous ! Réclamez le droit à la bidoche, à l’amour sans entraves, au cigare-cognac-Lagavulin ! Réclamez l’érotisme débridé des années 70, le non-conformisme, le droit de ne pas aimer Marc Lévy ni Anna Gavalda ! Battez-vous pour une école élitiste, la seule à fabriquer de l’égalité sur la base des talents, alors que l’égalitarisme est le garant des inégalités de naissance. Aspirez à un président anormal mais efficace ! Prenez le contrepied, allumez des contrefeux, formulez des contre-propositions — et mangez de la vraie viande.

    Jean-Paul Brighelli (Bonnet d'âne, 4 juillet 2013)

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  • L'engagement paillettes...

    Nous reproduisons ci-dessous un excellent point de vue , cueilli sur le site Idiocratie et consacré à l'argumentation de l'"aristocratie" progressiste dans le débat autour du mariage homosexuel...

     

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    L'engagement paillettes


    Dimanche 27 janvier, au théâtre du Rond-Point, on défendait le mariage pour tous mais les petits fours n’étaient pas pour tout le monde. Il n’y avait pas assez de place pour accueillir le public arguait-on du côté de l’organisation. Il ne s’agissait pas en effet d’ouvrir grand les portes au tout venant. L’égalité a ses limites. Où donc aurait-on mis Laurence Ferrari, Lara Fabia, Manuel Valls et Valérie Trierweiler ? Chacun à sa place, la fine fleur de l’aristocratie progressiste ne fraie pas avec la piétaille.

    La soirée de Bergé a simplement achevé de démontrer que la lutte en faveur du « mariage pour tous » est surtout menée au profit de quelques-uns. Réduisons ce noble combat à ce qu’il est : un divertissement sociétal et télégénique mené par une petite intelligentsia tyrannique qui cherche à s’inventer des raisons de croire qu’elle est encore de gauche, qu’elle est progressiste, qu’elle est égalitaire. De croire ? De convaincre au mieux ceux qui seraient encore assez naïfs pour penser que tous ceux qui étaient là dimanche en ont encore quelque chose à foutre de l’égalité qu’ils ont constamment à la bouche. Ce n’est pas pour rien que tous ceux-là se pressaient à la mangeoire d’un homme capable de déclarer : « Moi je suis pour toutes les libertés. Louer son ventre pour faire un enfant ou louer ses bras pour travailler à l'usine, quelle différence? »[1] Nous sommes aujourd’hui dans une situation de confusion idéologique telle que ce genre de cynisme peut passer pour du progressisme. On devine cependant, que pour les stars présentes ce soir-là au théâtre du Rond-point, le fait de pouvoir être vu à la soirée Bergé faisait office de brevet de respectabilité en garantissant l’estampille « défenseur de la liberté et des droits ». Le geste de la chanteuse Shy’m la veille qui a décidé de faire du bouche à bouche à une de ses danseuses en plein show participe de la même logique : s’afficher comme tolérante et cool, soit fréquentable et banquable. Cela n’a rien à voir avec l’engagement, il s’agit d’une stratégie de communication, simpliste mais efficace.


    Jean-Laurent Cassely l’écrivait très justement dans Slate il y a quelques jours, une partie de l’intelligentsia de gauche est dans l’impasse aujourd’hui. Elle n’a plus d’engagement social, elle a abandonné toute préoccupation idéologique et peine à faire croire à sa radicalité militante. Il lui faut donc se fabriquer un ennemi et composer pour cela « l’illusion d’une société réactionnaire et punitive » en faisant croire que « l'idéologie naturelle de la société du spectacle serait le "néoconservatisme", soit un mélange d'austérité religieuse, de contrôle éducatif impitoyable, et de renforcement incessant des institutions patriarcales, racistes et militaires.»[2] Tous les moyens sont bons dès lors pour s’afficher dans le camp du bien en brandissant les arguments les plus insolites et en usant des raccourcis les plus incroyables, ce qui autorise le député PS Christian Assaf à proclamer en pleine assemblée que « le temps du triangle rose est terminé ! » ou encore l’excellent Jean-Michel Ribes à conclure que « le papa et la maman, ça a donné Hitler ». Etait-il sérieux en sortant une telle énormité? Si c'est le cas, Roland Topor doit sûrement se retourner dans sa tombe…

    Dès lors, peu importent les arguments eux-mêmes avancés par ceux qui se déclarent opposés au mariage pour tous et à ses inévitables corollaires, adoption et extension de la PMA voire de la GPA, aucune des raisons invoquées pour justifier cette opposition ne compte puisque semblable opinion est tout simplement injustifiable aux yeux des défenseurs d’une certaine respectabilité intellectuelle. On peut en juger par exemple en considérant la passe d’arme qui a opposé dans le journal Le Monde la sociologue Nathalie Heinich et son confrère Alain Quemin. Dans une tribune publiée le 29 janvier, Nathalie Heinich croit bon de revenir sur quelques sophismes trop souvent utilisés par les partisans du mariage gay et notamment le fait de réduire le mariage à la simple reconnaissance d’un lien amoureux et à la reconnaissance institutionnelle d’une orientation sexuelle, ce qui revient à admettre que l’Etat ait un droit de regard sur la sexualité et l’intimité des personnes. « Faut-il accepter, au nom de l'égalité, que la sexualité entre adultes consentants devienne, pour tous - hétérosexuels comme homosexuels -, une affaire d'Etat ? C'est là une conséquence majeure de l'actuel projet de loi, qui mériterait d'être, pour le moins, discutée. »[3] Visiblement non pour Alain Quemin, partisan lui du mariage gay, qui réplique vertement à sa consœur le même jour[4] lui déniant toute légitimité à intervenir dans le débat et lui reprochant de ne pas user des références appropriées. On ne sera pas surpris d’apprendre que le dit Alain Quémin ne s’embarrasse pas quant à lui de références ou de légitimité tant ces deux arguments se voient systématiquement brandis face à quiconque a l’audace d’opposer aux partisans de l’égalité, de la fraternité et de la liberté un discours critique un tant soit peu cohérent et donc potentiellement menaçant. « Liberté, égalité, fraternité », c’est d’ailleurs la formule qui conclut l’acte d’accusation d’Alain Quemin, tout comme elle ponctue régulièrement l’argumentaire laborieux d’un Jean-Michel Ribes. La pauvre Nathalie Heinich se fatigue pour rien : même le dernier des illuminés peut la pulvériser en un tournemain en lui donnant du « Liberté, égalité, fraternité » et en l’accusant de ne pas avoir les références.


    La posture vertueuse permet donc de disqualifier toute tentative de mettre en avant les limites et les dangers recelés par certains aménagements législatifs et constitutionnels fondés sur l’amour du prochain, quel que soit son sexe. Ainsi, on peut penser que le débat autour de l’extension de la PMA ou de la légalisation de la GPA ne devrait pas trop durer, puisque selon les mêmes logiques, tous ceux qui mettront en avant les implications éthiques (le corps humains transformés en self-service), sociales (au vu des tarifs pratiqués on peut raisonnablement croire qu’il subsistera un léger différentiel social entre parents adoptifs et mère porteuse) voire eugéniques (le questionnaire visant à évaluer le capital génétique des donneurs de sperme ou des mères porteuses afin de garantir une satisfaction optimum de la clientèle est déjà une réalité dans les pays moins « en retard » que la France sur la question) de cette avancée se verront immédiatement et sévèrement recadrés en fonction du nouveau dogme de la Sainte Trinité de la Coolitude Morale, à savoir : tu n’es pas d’accord avec moi, tu es donc 1) homophobe, 2) raciste, 3) fasciste (cochez la case correspondant à la situation, voire cochez-les toutes). Le procédé est devenu traditionnel. On l’a vu à l’œuvre dans un autre contexte en 1992 lors de la campagne pour le oui à Maastricht, puis en faveur de la constitution européenne en 2005, autres grands moments du débat démocratique. Il est de bon ton aujourd’hui pour une partie des rebellocrates, comme disait le regretté Philippe Muray, de proclamer avec beaucoup de hauteur et de condescendance qu’il n’y a pas de débat sur les questions dont ils ont choisi la réponse. C’est une position qui était jusqu’à présent, et qui reste toujours dans une certaine mesure, très facile à défendre autour de combats – la défense du mariage pour tous, celle de l’adoption par les homosexuels, l’antiracisme, l’antifascisme…etc…etc…- consensuels et de thématiques généreuses qui sont au cœur de la coolitude, autrement dit d’un prêt-à-penser socialement acceptable qui est la clé de ce qu’on appelle aujourd’hui le « totalitarisme mou », c’est-à dire le flicage sympa mais ferme de chacun par chacun.


    Le danger de cette position dominante, sur le plan médiatique et social, de cette coolitude idéologique est qu’elle contribue à creuser de façon souterraine des clivages de plus en plus marqués et à former des antagonismes de plus en plus indépassables. Comment en effet ne pas mépriser la personne qui a le cynisme de prendre pour prétexte le respect des droits de la personne afin de réduire l’enfantement à un acte d’achat ? Comment à son tour ne pas considérer comme d'irrécupérables imbéciles ceux qui n'ont plus recours qu'à l'anathème et à l'insulte pour se justifier et n'hésitent pas ensuite à se présenter comme de perpétuelles "victimes de la haine"? De manière générale on peut simplement constater que la polémique autour du mariage homosexuel et la condamnation aussi agressive que systématique de tout ce qui ne ressemble pas à un consensus par les tenants du progressisme radical illustre non pas le divorce entre « la république et les catholiques » comme le fantasmaient quelques journaux mais également entre la gauche intellectuelle et le peuple, qui n’est plus cool, ni progressiste, ni fréquentable depuis longtemps. L'autre écueil que ne voient peut-être pas les partisans les plus belliqueux du mariage pour tous et les plus prompts à en appeler à la puissance publique pour punir les "discours de haine", c'est exactement celui que décrit Judith Butler, pourtant la papesse des théories du genre, dans son ouvrage Le pouvoir des mots. Politique du performatif: dès lors qu'on demande à l’État de devenir l’arbitre systématique des violences verbales exercées par des citoyens sur des citoyens au nom de la lutte contre la discrimination, « la résistance politique court le risque de se réduire à l’acte d’engager des poursuites ».[5] C'est bien en un sens ce en quoi se sont transformés les acteurs de la radicalité militante gay et lesbienne: en petits flics procéduriers désormais incapable d'user d'autres moyens rhétoriques que celui de la posture victimaire, de l'insulte et de la menace juridique face à la moindre contradiction. 

           Si les participants à la manif pour tous du 13 janvier n'ont pas refait 1984 en égalant l'ampleur du mouvement en faveur de l'école libre, les LGBT ont quant à eux accouché de leur premier enfant: un 1984 orwellien de pacotille dans lequel le langage est constamment suspect et la parole au service d'une réécriture du réel. Ajoutons à cela la possibilité que laissera dans un futur proche la PMA et la GPA pour quelques couples aisés (homosexuels et hétérosexuels d'ailleurs, à partir du moment où la brèche sera ouverte pourquoi se priver?) d'avoir des enfants à la carte et de louer les ventres comme d'autres louent leurs bras à l'usine et nous auront un avant-goût du 1984 à la sauce consumériste que défend Pierre Bergé. Salauds de riches.

    Des idiots (Idiocratie, 2 février 2013)

    Notes :

    [2] http://www.slate.fr/story/67615/campagne-mediatique-mariage-pour-tous. Jean-Claude Michéa. Retour sur la question libérale. Cité par Jean-Laurent Cassely.
    [3] http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/01/29/mariage-gay-halte-aux-sophismes_1823018_3232.html
    [4] http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/01/29/quand-le-risque-de-l-egalite-fait-perdre-la-raison_1824123_3232.html
    [5] Judith Butler, 2004, Le pouvoir des mots. Politique du performatif, traduit de l’anglais (Excitable Speech, Routledge, 1997) par Charlotte Nordmann, Paris, Éditions Amsterdam


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  • Les indignés du bocal...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Claude Bourrinet, cueilli sur Voxnr et consacré à la mobilisation de "l'Empire du bien"  et de ses éminents représentants contre le régime syrien...

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    Les indignés du bocal

    Si j’en crois les quelques images que j’ai pu glaner les quelques rares fois que je regarde les déformations de la télévision – et je ne m’en porte pas plus mal – on paraissait se bousculer mardi dernier, sur le parvis du Trocadéro. Les figurants (le terme est sans doute approprié pour ce type de spectacle), étaient pris en gros plan, de façon à ce que la réalité de la mobilisation n’apparaisse pas cruellement (200 personnes, selon les uns, 50 selon les autres, après un matraquage médiatique omniprésent). Cela n’empêche pas tel journal de plastronner : « Une véritable « vague blanche » a déferlé, mardi soir ». La Fédération internationale des ligues des droits de l'homme n’épargnait pas non plus le tonneau à blabla : « Pour réclamer l'arrêt des massacres en Syrie, hissons des tissus blancs. Partout dans le monde des hommes, des femmes, des enfants, un tissu blanc à la main ». Pourquoi « blanc » ? Jouirait-on, par là, du monopole de la pureté ?

    Quoi qu’il en soit, on reconnaîtra le style boursoufflé des indignés de circonstance, que l’on trouve toujours quand le système claque du doigt. Ce style grandiloquent ne fait, au fond, que reproduire la logorrhée déclamatoire des merdias enrégimentés, alimentés par le douteux Observatoire syrien des droits de l’homme, domicilié à Londres, et les envolées grotesques des chancelleries occidentales, en particulier de nos histrions (sinon hystériques) nationaux, Alain Juppé, ministre des indignations sélectives, et BHL, ministre de la Propaganda. Le philosophe du micro, d’ailleurs, évoquant les « méthodes particulièrement inhumaines » du régime syrien (et le lynchage de Kadhafi ? c’était une bagarre d’écoliers ?), tempête : « Autant de crimes qualifiés par les organisations humanitaires et par l’ONU de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité. » « Chaque jour perdu est une chape de plomb qui s’abat un peu plus sur le peuple syrien ». On reconnaît bien le style gracieux et aérien de notre pourfendeur de l’ « idéologie française », « philosophe et membre du conseil de surveillance du Monde », comme il se désigne lui-même sans rire ! De la part de gens qui ont toutes les indulgences pour l’Etat juif de Palestine, cela porte pourtant à rigoler. Il vaudrait le coup de relever toutes les hyperboles vibrantes qui parsèment, tels des épouvantails, leur misérable champ de patates : quand ce n’est pas « impitoyable », c’est « sanguinaire », « innommable », « tyrannique », etc., agrémentées, comme l’est de son chapeau difforme notre épouvantail, d’adverbes d’intensité : « particulièrement », « extraordinairement », « incroyablement », comme si, les substantifs et les adjectifs s’usant à l’emploi, on avait recours à des modalisateurs, ainsi qu’une huile moteur dans un moteur un peu grippé, à bout de course, et qui n’a pas été vidangé depuis belle lurette. Il faudrait se purger !

    Du reste, à parcourir la liste des signataires de l’appel du « Collectif urgence solidarité Syrie », on retrouve des noms connus, les idiots utiles, bien sûr, mais aussi les cyniques, les politiciens atlantistes et sionistes (celui de Frédéric Encel est tout un programme !), ceux aussi qui savent que ce serait bien de figurer là, pour la réclame, enfin, tous ceux qu’on ne verra pas manifester contre les arrestations arbitraires et la colonisation en Israël, contre la torture et les arrestations arbitraires en Libye, contre les massacres de l’Otan et la politique agressive des Etats-uniens envers des nations indépendantes et libres (François Hollande s’y trouve, ce qui augure bien mal de sa volonté de prendre des distances par rapport à l’empire américain…).

    Et pour faire bonne mesure, la photographe américaine, Sarah Moon, a organisé une opération d’agit-prop, en photographiant des pipeules, effigies amusantes, qu’on a arborées au Trocadéro comme des icônes sacrées : pensez donc ! la madone Jane Birkin, toujours miraculeusement présente où il y a de l’écume, Catherine Deneuve, autre Vierge sur le retour, Piccoli, Thuram et compagnie, bref, du beau linge de bonne famille, bien propret et plié pour le service.

    Et puis il y avait Stéphane Hessel. Que diable allait-il faire dans cette galère ? Le personnage est sympathique (d’ailleurs, les autres aussi, ils sont sympathiques, ils sont mignons, ils sont talentueux, et, en plus, ils sont bons, généreux, dégoulinants de crème compatissante), et parfois, il ne se trompe pas. Car, c’est bien cela, l’inconvénient, avec les poussées d’indignation : ça tombe juste une fois sur deux.
    L’ancien Résistant a essuyé les crachats et la haine des sionistes pour son soutien à la cause palestinienne et sa critique de l’ « Etat hébreux », comme disent nos merdias, ce qui vaut bien notre indulgence et toutes les légions d’honneur de notre République, Mais pour le coup, notre vieillard « indigne » (comme le clame, en substance, cet autre clown néocon du Figaro, Rioufol), démontre que les bons sentiments ne garantissent pas la pertinence de la pensée. Il n’est certes pas question de contester sa sincérité, mais au moins aurait-il dû s’interroger, et se demander si les chiffres avancés par les organes de propagande atlantiste sont vrais, qui sont ces « victimes civiles », si elles sont aussi « civiles » qu’on le dit, et si, parmi elles, il n’y a pas des cibles innocentes des salafistes et autres mercenaires qataris, si la « rébellion » n’a pas été fomentée, si les images que les télés montrent en boucle sont authentiques, bref, si l’information est vraiment équitable, et ne se réduit pas à de la déformation, et si, plus profondément, l’offensive contre la Syrie, comme celle, il y a peu, de la Libye, et, auparavant, de l’Irak et de l’ex-Yougoslavie, n’appartiennent pas à un plan machiavélique de destruction des sociétés civiles et d’hégémonie mondiale.

    Stéphane Hessel, qui a eu son heure de gloire avec son opuscule « Indignez-vous ! », et qui a entraîné dans son sillage pathogène des milliers de jeunes formatés par la rhétorique bienpensante, et néanmoins bêtifiante, de nos lycées, pense que l’expression émotionnelle permet d’éviter d’aller plus à fond. Certes, il faut aimer le Bien et haïr le Mal. Encore faudrait-il peser ces mots, car peser, c’est penser, et se pencher un peu sur l’âpre et rugueux terrain de la réalité, qui présente infiniment plus de nuances que la morale sans détour.
     
    Claude Bourrinet (Voxnr, 18 avril 2012)
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  • L'intégrisme de la rigolade...

    Les éditions Mille et une nuits publient dans les prochains jours un pamphlet de François L'Yvonnet intitulé Homo comicus ou l'intégrisme de la rigolade. L'auteur est professeur de philosophie et dirige la précieuse collection des Carnets de l'Herne.

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    "Ce pamphlet est né d’un agacement, celui de voir parader sans vergogne, à longueur de médias, une ribambelle d’humoristes d’un nouveau genre, moins amuseurs que donneurs de leçons, moins  « comiques » qu’agents autoproclamés du Bien.
    Ils éreintent mais sans risque, ils accusent, ridiculisent, frappent de dérision sans ménager la moindre possibilité de défense. Des procureurs hargneux, dans des procès joués d’avance. Le sérieux, voilà l’ennemi.
    Ils règnent à la radio, à la télévision, dans la presse écrite, publient des livres, font des films, achètent des théâtres… C’est une nouvelle féodalité, avec ses prébendes et ses privilèges.
    C’est un nouvel intégrisme, celui de la rigolade. Il faut rire de tout mais avec eux. Le rire, « leur » rire est la norme. À les écouter, ils seraient l’actuelle incarnation de la liberté d’expression et de toutes les valeurs réunies de la démocratie. On croit rêver… Leurs saillies sont pourtant d’une incroyable platitude et leurs prêchi-prêcha, troussés à la va-vite, épargnent les vrais puissants. Curieuse époque que la nôtre, qui voit le « bas-bouffon » tenir lieu de conscience et de pensée."


     
     
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